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6 novembre 2010 6 06 /11 /novembre /2010 19:03

Calvin, promoteur d’écoles chrétiennes.

A lors qu’un peu partout s’est fêté le 500ème anniversaire de la naissance du grand Réformateur français, Jean Calvin, rappelons-nous que l’une de ses grandes préoccupations a été l’éducation des enfants, en particulier leur éducation scolaire, au point qu’il a affirmé : "l’Eglise n’a jamais fleuri sans écoles" ! Il n’est guère étonnant que l’accent mis par les protestants sur la lecture personnelle de la Bible les ait conduits à accorder une attention toute particulière à l’instruction. L’école a joué un rôle fondamental dans ce mouvement de la Réforme qui veut l’Ecriture sainte au coeur de l’Eglise, de la famille, et aussi de l’individu.

 

Un prédécesseur : Martin Luther.

La vision et l’action de Calvin dans ce domaine s’inscrivent dans la continuité de celles de Martin Luther, le "prophète des écoles chrétiennes", qui avait écrit dès 1520 : "Instruisez le peuple ! Et surtout prenez à coeur son développement spirituel ! Créez un peuple chrétien ! Pénétrez-le de l’Esprit de l’Evangile ! C’est là seulement qu’est pour la nation l’ancre de salut." "Je ne conseille à personne de placer son enfant là où les Saintes Ecritures ne sont pas souveraines. Je crains bien que ces écoles ne démontrent qu’elles sont les larges portes de l’enfer, à moins qu’elles ne s’efforcent diligemment d’expliquer les Saintes Ecritures et de les graver dans le coeur des jeunes. Toute institution dans laquelle les hommes ne sont pas continuellement préoccupés de la Parole de Dieu est vouée à la corruption." En 1524, Luther écrit aux Magistrats des villes allemandes pour les inviter à ouvrir et à entretenir des écoles chrétiennes : "C’est vrai : j’aimerais mieux qu’un garçon n’apprenne rien du tout et qu’il soit muet, plutôt que de voir les universités et les couvents rester ce qu’ils ont été jusqu’à présent, s’il n’y avait aucune autre manière d’instruire et de vivre qui puisse être mise au service de la jeunesse. Car c’est ma ferme intention, ma prière et mon désir que ces écuries à ânes et ces écoles diaboliques, ou bien disparaissent dans l’abîme, ou bien soient transformées en écoles chrétiennes ! " En 1530, Luther insiste en écrivant une prédication sur le devoir d’envoyer les enfants à l’école. Non pas pour y être comme dans un cocon, mais pour y être préparé à devenir "un serviteur, un roi et un prince dans Son royaume, un sauveur et un consolateur des hommes dans leur corps et leur âme, leur bien et leur honneur, un capitaine et un chevalier contre le diable." Luther continue : "C’est pour l’amour de l’Eglise qu’il faut avoir et entretenir des écoles chrétiennes. Dieu maintient l’Eglise à l’aide des écoles, celles-ci soutiennent l’Eglise. Elles ne jouissent point d’une grande considération, mais elles sont fort utiles et même indispensables."

 

Calvin « enfonce le clou ».

Nul divorce donc entre le propos pédagogique, l’apprentissage à l’école, et la visée spirituelle. Nul divorce entre la foi et l’étude des lettres. C’est le principe de la "piété lettrée" qui est appliqué. L’homme est créature de Dieu. Il a reçu en gage le jardin de la terre qu’il a peuplé d’enfants. Il en est le responsable, le cultivateur, le gardien. Il doit le conserver intact, le gérer, en développer les potentialités multiples, y compris les siennes propres.

Il est, par définition, un éducateur. Calvin continuera d’incarner cette vision particulière de l’éducation. Il contribuera grandement au développement et à la renommée de l’Académie à Genève, ville qui était passée à la Réforme le 21 mai 1536 : le droit de l’instruction est donné à tous les habitants sans exception, des siècles avant les lois de Jules Ferry. On peut lire dans le registre du Conseil : "…que chacun soit tenu d'envoyer ses enfants à l’école et les faire apprendre". Calvin s’est en particulier inspiré du système d’éducation de Sturm à été son propre maître lorsqu’il avait été jeune, un humaniste, un grammairien, et avant tout un chrétien : Mathurin Cordier. 2000 élèves se mettent à fréquenter cet établissement de Genève, au bénéfice d’études que Calvin voudra sérieuses, complètes, et tournées vers l’essentiel : l’Ecriture sainte "engravée en nos coeurs par le doigt du Dieu vivant".

 

Un grand rayonnement.

Le rayonnement de cette oeuvre scolaire fut grand. Il inspira le mouvement d’implantation de près de 2000 écoles protestantes en France, une vingtaine d’Académies (l’équivalent d’Universités), et inspira la création de manuels scolaires et d’abécédaires joignant à l’apprentissage des lettres celui de la foi. En 1559, les Eglises Réformées de France commandaient : "Les Eglises feront tout devoir de faire dresser écoles et donneront ordre que la jeunesse soit instruite." Les pasteurs se firent instituteurs, et la plupart des temples servirent d’école. En temps de persécution, Calvin s’adressait ainsi aux chrétiens restés en France, les encourageant à envoyer leurs enfants pour être instruits à Genève: "Envoyez moi du bois, je vous renverrai des flèches !". Loin d’être un "cocon" déconnectant les jeunes de la réalité de la vie, ces institutions ont formé ces "capitaines et généraux contre le Diable" dont parlait Martin Luther ; parmi eux, des évangélistes qui sont allés jusqu’à donner leur vie en France. Comme tous les Réformateurs de ce temps, Calvin considérait que l’implantation d’écoles répondait au mandat d’enseigner que le Christ avait confié à l’Eglise, et constituaient sa plus grande richesse. Ces écoles, écrit Calvin, sont "les semences des Eglises, des "fontaines d’humanité", le "principal ornement des cités" ; il insistait : "Toute bonne instruction doit commencer par la foi". Les écoliers commençaient leurs journée en priant ainsi : "Seigneur, tu es la fontaine de toute sagesse et science, puisqu’il te plaît de me donner le moyen d’être instruit en l’âge de mon enfance, pour me savoir saintement et honnêtement gouverner tout le cours de ma vie, veuille aussi illuminer mon entendement…"

C’est dans ce contexte qu’un professeur de l’Académie de Saumur répondit à la question de savoir en quoi consistait l’éducation: "L’éducation ? C’est enfanter des enfants à Jésus-Christ."

Ce modeste rappel de l’oeuvre et de la vision de Calvin et, plus largement, des Réformateurs, en matière d’éducation scolaire, ne peut pas nous laisser indifférents aujourd’hui. Elle inspire et fonde la démarche des établissements scolaires protestants évangéliques.

Luc Bussière

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